ÉGLISE SAINT-MICHEL

L'église Saint-Michel de Lestignac date de 1265. Les façades, les toitures et le cimetière sont inscrits à l'inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques depuis le 1 février 1988

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Le ravissant hameau de Lestignac conserve son église au plan très simple, à un kilomètre au nord-ouest de Sigoulès. Elle se compose d’une nef unique rectangulaire, suivie d’un chœur à chevet plat dont la voûte disparue était contrebutée par des contreforts d’angles. Le clocher barlong surmontant la façade occidentale est lui aussi appuyé par deux contreforts d'angles. Nous trouvons trois époques dans la structure de cette église mentionnée pour la première fois en 1274 350 : l'époque romane, la fin du XIIIe ou le début du XIVe siècle et le gothique finissant (fin du XVe ou début du XVIe siècle) dont certains éléments annoncent la Renaissance. Les intempéries ont fait que des pierres plus récentes ont été rajoutées au cours des siècles.

La construction romane

Le mur sud, construit en moyen appareil régulier, a conservé à l'extérieur deux contreforts plats de type roman qui contrebutaient deux pilastres plats subsistant à l'intérieur, Ces derniers ont peut-être servi à supporter une corniche (fig. 91, p.61; fig. 92, p. 62). Le goutterot nord a perdu ses contreforts probablement à la suite de la réfection du XVe siècle, Une rupture de l'appareil montre que le mur roman se continue au sud jusqu'au niveau de la baie située après le second contrefort. Le mur nord montre à l’extérieur les traces d’arrachement de deux anciens contreforts qui n'étaient pas symétriques avec ceux du sud mais situés plus au centre de l'édifice. Il est aujourd’hui complètement aveugle et a subi de multiples remaniements qui rendent très ardue la compréhension de sa structure (fig. 93, p. 62). Il est formé par un mélange de gros blocs, de moyen appareil et de moellons disposés de façon non homogène. Aucune assise n’est régulière hormis peut être à la base du mur où apparaît avec des ondulations, un semblant de lit de pierre en moyen appareil comparable à celui du mur sud. La nef rectangulaire est couverte d’un lambris. Aucun élément ne nous permet de savoir si ce lambris a remplacé une simple charpente ou une voûte. Cette nef, aujourd’hui sans travée, est éclairée au sud par une baie tardivement percée. La face nord est nue et aveugle. Seule une niche rompt sa monotonie dans laquelle est encastrée une cuvette de pierre. Nous ne connaissons pas l'extension de l’église à l'époque romane et il ne reste rien de sa façade occidentale. Cette première campagne a dû se dérouler au XIIe ou au XIIIe siècle.

Dans la maçonnerie de la façade se trouve encastré un remploi de chapiteau roman représentant un personnage vêtu d’une tunique et jouant d’un instrument de musique. Ce chapiteau est l'unique vestige de sculpture romane de l’église de Lestignac ou bien provenait d'un autre édifice (fig. 94, p. 63; fig. 104, p. 68). I représente un joueur de viole avec, à sa gauche, la tête d’un petit personnage couronné. Peut-être s'agit-il de David jouant devant le roi Saül : "Ainsi, chaque fois que l'esprit de Dieu assaillait Saül, David prenait la cithare et en jouait; alors Saül se calimait, il allait mieux et le mauvais esprit s'Écartait de lui”. 351

Les transformations de la fin du XIIIe où du début du XIVe siècle

Deux fines colonnes dans les angles nord-est et sud-est dont le style appartient à la fin du XIIIe ou au début du XIVe siècle attestent que le chevet fut élevé dès cette époque (fig. 95, p. 63). On envisagea de le voûter d’une croisée d’ogive, Nous ignorons si ce voûtement a réellement été entrepris car les autres supports ont disparu, Peut-être qu'ils n'ont jamais été construits. À l'intérieur, il subsiste un vestige de banquette en pierre ajusté dans le mur oriental (Hg. 96, p. 64).

Le gothique flamboyant

Une superbe baie axiale au remplage flamboyant orné de coeurs, de mouchettes et de deux trèfles a été percée dans le mur oriental du chevet sans doute à la fin du XVe où au début du XVIe siècle, Elle a été obstruée par une désolante maçonnerie et n'est aujourd’hui visible que de l’extérieur. Un petit oculus, au nord de cette baie, creusé dans un bloc monolithe atteste de la présence eucharistique. Cet oculus correspond à l'intérieur à une étagère creusée dans le mur sur laquelle brûlait la flamme eucharistique. Au-dessous d’elle se trouve le tabernacle (fig. 97, p. 64). Ces deux niches sont fermées par une même porte. Nous retrouverons ce type de tabernacle à oculus spécifique aux cantons de Sigoulès et d'Eymet à Monbos, Mescoules et Sigoulès. Le vocabulaire flamboyant qui en émane nous la fait remonter également de la fin du XVe ou du début du XVIe siècle. De Chapiteaux-bagues comportant encore quelques assises en tas de charge, avec les naissances des ares en pénétration, Ces chapiteaux, réduits à un simple bandeau sculpté, représentent, côté sud, deux chiens ou deux ours affrontant deux serpents entrecroisés et côté nord, une guirlande de serpents entrecroisés (fig. 98 et 99, p. 65). Les nervures, au nombre de cinq, montrent que ces colonnes étaient prévues pour recevoir les arcs d'ogives, les arcs formerets et l'arc triomphal. Or, il manque des supports dans la nef car nous voyons le départ des ogives qui auraient dû être lancées au-dessus de celle-ci. Soit la construction de ces colonnes à été interrompue à la suite des guerres religieuses, soit l’église n’a jamais été terminée. Les parties supérieures des deux colonnes logées dans les angles de l’abside ont alors été modifiées : on leur à rajouté des pénétrations (fig. 100, p. 66). Les deux contreforts d'angle qui devaient contrebuter les poussées des ogives, appartiennent à cette même campagne. Cependant, le contrefort nord-est a été complètement repris (fig. 93, p. 62).

Dans la façade occidentale s'ouvre un portail en arc brisé de style gothique flamboyant à quatre voussures retombant sur des piédroits moulurés se prolongeant sur de petites bases prismatiques (fig. 101, p. 66). Le décor des impostes formant une frise est à base de fleurons, de quintefeuilles, d’écussons et de fleurs de lys (fig. 102 et 103, p. 67). Le linteau en arc en anse de panier s'appuie sur le portail. Il est aujourd’hui noyé dans la maçonnerie constituant l'encadrement d’une porte plus récente, sans doute du XVIIe ou XVIIe siècle. Il est surmonté Par un tympan aveugle portant un socle avec une croix de pierre. Au-dessus, un arc en accolade, avec crochets et choux frisés, encadré de pinacles surmonte le portail (fig. 104, P. 68). Un écu surmonté d’une couronne est sculpté dans l’écoinçon formé par l’accolade. ]I est très abimé et nous ignorons s’il portait les armoiries d’un seigneur local (fig. 101, p. 66). Cette façade supporte un clocher barlong dont le mur occidental et la face sud ont été très remaniés. ]1 prolonge au sud l'ancien cimetière 355. La toiture de l’église a entièrement été refaite en 1985 avec des tuiles canal 356, Outre les façades et les toitures de l'église, la C. O. R. E. P. H. A. E. a estimé que l’ancien cimetière flanqué au sud de l'édifice méritait également une protection. Considérant que l'église présentait un intérêt d'histoire et d’art suffisant pour en rendre désirable la préservation en raison de la qualité de son architecture, l’ensemble a donc été inscrit sur l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques le 1er janvier 1988 357, En 1992, la poutre de la charpente a cédé et la fenêtre du choeur menaçait ruine, aussi, il était question de la déposer 358. Le pilier sud s'est effondré en 2009. Des travaux de confortation ont suivi. Les façades ont été ravalées et la toiture a été remaniée en 2023.

Extrait de mémoire de maîtrise d'une étudiante en histoire de l'art

350 MAUBOURGUET (L), Sarlat et le Périgord méridional, tome I, le Périgord méridional des origines à l'an 1370, étude d'histoire politique et religieuse, thèse de doctorat présentée à la Faculté des Lettres de Bordeaux, Cahors, 1926, p. 401 à 403.
351 La Bible de Jérusalem, la Sainte Bible traduite en français sous la direction de l'École Biblique de Jérusalem, nouvelle édition, Éditions du Cerf, Paris, 1973, Premier livre de Samuel, David entre au service de Saul, p. 423.
355 D. R. A. C. de Bordeaux, département des Monuments Historiques. 11 s'agit de la parcelle A 468.
356 D. R. A. C. de Bordeaux, département des Monuments Historiques, Avis de classement, 8 septembre 1976.
357 MOREAU-DETHOUARS (P.), Monuments historiques: dossiers de la Dordogne examinés par la C. O.R. E. P. H. A. E. en 1987, Bulletin de l'A. D. R. A. P. (Association pour le Développement de la Recherche Archéologique en Périgord), n°2, Périgueux, 1987, p. 101 et 102. D. R. A, C. département des Monuments Historiques : l'estimation globale des réparations à effectuer à l'église est de 100 000 francs.
358 Bâtiments de France de Périgueux, message téléphonique de madame Mahieux, secrétaire de mairie aux Bâtiments de France à Périgueux, 11 février 1992.